"Mes transports pas amoureux mais presque" ou "Ces mécaniques que j'ai roulées"
N°7 : Le Ford Transit de 1984 à 1996 (troisième et dernière période).
Véhicule alternatif ou véhicule dédié aux vacances le Transit nous attendait sagement, tous les ans, dans la région parisienne. L'Oncle Bruno venait de Maule tous les mois pour le démarrer et vérifier son état dans la ferme des Yvelines qu'il nous avait trouvé comme pension. Ce qui fait qu'il a toujours été opérationnel dès qu'on en avait besoin, chaque vacances, au premier tour de clef. Le souci, surtout les premières années où les enfants étaient tout petits, c'était la sécurité à bord. Le Transit était un trois places, il y avait donc trois ceintures de sécurité sur les sièges avant mais rien sur la banquette arrière aménagée par nous, sur un coffre, accolé au lit. Alors, on voyageait de nuit, de préférence, les enfants dormaient sur le lit ou jouaient au sol sur la moquette et ils adoraient ça. Par bonheur, il n'y a jamais eu de freinage en catastrophe qui aurait pu les projeter sur les parois capitonnées ou sur la lunette arrière. On ne voyageait jamais l'esprit tranquille !
Au début, on prenait encore les autoroutes au tarif presque double des voitures mais les années passant, sans oublier la gourmandise en Super du moteur, finirent par avoir raison de notre budget transport et on s'est dit que les nationales, finalement, n'avaient pas que des désavantages. Pourtant, chaque année ou presque, on faisait notre tour de France : de Paris à Mougins, de Mougins à Lorient, de Lorient à Paris, dans ce sens ou dans l'autre, tous les étés et une ou deux fois à Noël, pour garder une vie de famille et que nos parents voient grandir leurs petits-enfants. Et puis, en 1993, on est rentré définitivement sur Marseille et le Transit est devenu notre véhicule principal pour les trois années qui vont suivre.
Les orages d'août peuvent être sauvages en Provence et, lors d'une balade vers Sisteron, le Transit a essuyé une averse de grêle avant d'arriver à Manosque qui nous a tous terrifié et nous a obligé à nous arrêter sur la première aire venue. Les grêlons avaient la taille d'œufs de pigeons et martelaient les tôles comme des flashballs en continu. Nous avions un toit ouvrant en verre et la violence des impacts était si forte qu'on craignait à tous instants de voir la vitre exploser. Les enfants, juste en dessous, s'étaient repliés angoissés sur le lit et on a attendu que cela se calme. Dix minutes après, tout était fini, la vitre du toit avait résisté, on est sorti pour voir les marques sur la tôle mais là aussi, aucuns stigmates de l'agression passée, seuls les glaçons énormes jonchant le sol témoignaient qu'on n'avait pas rêvé.
Les balades en famille se sont plus raréfiées et le Transit me servait surtout pour aller au travail au lycée ou aux réunions pour les corrections du Bac. A l'époque, on corrigeait à Toulon les épreuves plastiques des deux Académies : Aix-Marseille et Nice. C'est là que j'y ai retrouvé pour la première fois Gilles Boudot, un camarade de la même promotion que moi à Luminy, vingt ans auparavant. J'avais toujours mon copilote officiel, Marie-Françoise, qui a fait plusieurs fois le trajet avec moi, sur cette banquette avant un peu spartiate, avec une vue imprenable sur le bitume et où on échangeait des anecdotes, plus ou moins personnelles, plus ou moins professionnelles, souvent à tue-tête, pour couvrir le bruit du moteur.
Puis sont devenus plus prégnants d'autres désagréments dus à son encombrement. Il m'arrivait le soir de chercher pendant parfois trois-quarts d'heure une place libre pour stationner le Transit près de chez nous dans le quartier des Cinq Avenues. Il y eut aussi des jours où je le garais très loin et je revenais le chercher tard le soir pour le rapprocher. Le sommet fut atteint lorsqu'un matin, je retrouvais le Transit les quatre roues crevées rue Lacépède et comme je m'étais collé le plus près possible au trottoir pour moins gêner la circulation j'avais une peine supplémentaire : la difficulté d'introduire le cric et de démonter les jantes. Vous pouvez imaginer la suite : démonter les roues une à une, les faire rouler jusqu'au garage le plus proche (le Renault des Chartreux), une fois réparées les remonter contre le trottoir. Il y a des malfaisants qui sont des Paganini dans leur discipline. Dès le lendemain, je cherchais une place de stationnement dans les garages/parkings surveillés du quartier. Pas un ne m'a accepté. Trop large, trop peu vitré ("on peut se cacher derrière pour vandaliser les véhicules d'autres clients"), bref - indésirable ici comme il avait pu l'être pour d'autres raisons en Martinique. Il a fallu se résoudre à lui trouver un remplaçant. J'ai trouvé à Célony, un garage qui vendait un Espace Renault d'occasion en très bon état malgré ses quatre ans. J'ai sauté sur l'affaire.
J'ai mis en vente le Transit pour une petite somme et un acheteur s'est présenté. C'était un jeune homme qui fabriquait des enceintes acoustiques et avait besoin d'un gros volume pour les transporter, la consommation d'essence ne lui posait pas de problème et pendant les années qui ont suivies, je revoyais régulièrement le Transit stationné ici et là, dans le quartier, très repérable à cause de ses élargisseurs d'ailes autour des roues et de son spoiler. En jetant un œil à l'intérieur, j'ai vu que l'aménagement en Van avait disparu : plus de coffres, ni de lit, ni de meuble cuisine/sanitaire mais le capitonnage et l'isolation avaient été conservés. Le Transit était reparti pour une quatrième vie, pour d'autres transports, mais cette fois-ci sans nous.En noir et blanc, en bas, notre Cher oncle, Bruno Fasol qui s'est dévoué pour nous et notre Transit pendant de longues années et qu'on n'aura jamais assez remercié. |
A gauche, 1988-05-13, Ariel et Chloé en Martinique, aux Manguiers. A droite, 1989-03-02, Ariel et Chloé sur le tapis, aux Manguiers. |
1996-08-18 Chloé et Ariel en réalité devant la piscine de Papy, Mougins. |
1993-10-10 Cyril, Vincent, Ariel et Chloé dans le Transit à Aix-en-Provence chez les Colard. |