"Mes transports pas amoureux mais presque" ou "Ces mécaniques que j'ai roulées"N°5 : Le Ford Transit de 1982 à1984 (deuxième période).
En août 1982, le Transit rentrait à "L'Atelier" pour quelques jours de relooking. Comme vous l'avez vu précédemment, la somme gagnée à "Jeune Afrique" en 1981, nous avait permis de verser les premières mensualités pour le Transit mais surtout avait rendu possible un voyage à New York, avec notre ami Daniel, où nous avons fait un séjour d'un mois et demi. Nous étions revenus gavés d'images d'Epinal des States : des rollers skates dans Central Park aux Yellow Cabs à Time Square, nous découvrions les premiers graphs mobiles sur les rames de Métro : éclairs hallucinés et colorés dont on ne s'est jamais trop remis. J'avais photographié pas mal de graphs fixes à Staten Island qui me plaisaient bien et c'est naturellement au vocabulaire graphique des graffitis new-yorkais que j'ai pensé pour habiller ma mini rame perso. Dans la Grosse Pomme, on avait vu des vans aussi et c'était un peu dans cet esprit qu'on avait aménagé le Transit. A l'époque, je feuilletais des revues genre "Chromes et flammes" et "Nitro" : les pneus californiens "Pos-a-traction" et les peintures "Candy Apple" étaient pour nous des incontournables d'une customisation réussie. Comme Claude Venturelli était un pro de la peinture sur carrosserie, il s'est chargé de m'acheter les couleurs qui correspondaient à mes photographies modèles et les paillettes diffractantes à noyer dans les multiples couches de vernis polyuréthane. Il m'a aussi repeint entièrement en blanc immaculé les tôles un peu défraichies par le périple algérien. Je me suis donc attelé à la tache de reproduire les graphs new-yorkais choisis sur les différents panneaux du Transit avec l'aérographe professionnel de Claude et quelques jours plus tard c'était terminé. Jean-Paul, avec son savoir-faire, m'a même reproduit des typos publicitaires qui surnageaient entre les graphs pour un trompe-l'œil encore plus fidèle. Claude a verni l'ensemble des huit couches incrustées des paillettes. Pour sa première sortie à Cannes, le Transit a été repéré par un journaliste de "Créations", organe des pédagogies Freinet, qui travaillait sur un article où il était question de "customs de petits et de grands".
Ensuite, nous sommes remontés sur Paris où se trouvait mon nouveau poste. Le Transit dormait au pied de chez nous, dans la rue Boinot, entre Montmartre et Clignancourt, où nous habitions, et n'a jamais été vandalisé. Une seule fois, alors que nous étions en virée à Lille, chez Véro, une main amoureuse avait tracé au pinceau dégoulinant un "Love" rouge et baveux, pendant la nuit.
En septembre 1983, je quittais mon poste de Goussainville pour une mutation à Fort-de-France, en Martinique. J'avais droit à un container pour mes effets personnels, j'y ai mis surtout ma camionnette et quelques cantines d'affaires.
La Martinique est une petite île des Caraïbes, les routes sont étroites et les véhicules particuliers modestes ou discrets, leurs conducteurs pas toujours scrupuleux sur le respect de leur droite. Bref, un peu l'inverse de la spécificité de notre Transit qui était large et voyant. Bariolé comme il était, il rappelait aux gens les guimbardes de Vaval, souffre-douleurs pétaradants des Carnavals. Pas un début de semaine ne se passait sans qu'un élève me dise qu'il avait vu le Transit le dimanche à la Caravelle, au Prêcheur ou aux Salines. Mieux qu'une balise Argos ou un bracelet pénitencier, mon étendard à roulettes ne pouvait pas cacher ma présence ici ou là et le "maquerellage/makrêlage" allait bon train. En rajoutant le fait qu'on boit encore davantage lorsqu'il y a des fêtes : "Vaval" bien sûr mais aussi le lundi de Pentecôte, jour du "Matoutou" ou encore "La Fête des mères".
Le premier accrochage a eu lieu le soir du Mardi Gras, le conducteur du véhicule adverse était travesti en femme (un classique) et s'est raccroché à sa portière pour ne pas s'affaler sur la route pour remplir son constat amiable. Quelques mois après, le jour de la Fête des Mères, un autre chauffard, lui aussi chargé en rhum, ratait son virage et me frappait au niveau de l'aile et de la portière avant. Il n'y avait pas de concessionnaire Ford en Martinique et je ne pouvais pas faire réparer mes dégâts qui nécessitaient de changer entièrement porte et aile. Nous avons alors compris avec certitude que notre cher Transit n'avait pas sa place sous ces tropiques-là et qu'il allait falloir lui trouver un remplaçant d'urgence. Les 205 Peugeot se vendaient comme des petits pains aux dires de la commerciale. Il y en avait effectivement beaucoup en circulation, elles étaient petites, compactes et maniables, idéales pour les routes martiniquaises et leurs usagers parfois approximatifs. On en a commandé une et on a renvoyé le Transit amoché en métropole.
Venu en quinze jour par bateau, le Transit a été chargé sur un Boeing 747 d'Air France Cargo et a été déchargé neuf à dix heures plus tard à Orly où je le récupérais pour le faire réparer. La partie réparée était blanche, cela m'aurait coûté trop cher de racheter les multiples couleurs, les paillettes et de faire refaire les multiples couches de vernis. La mort dans l'âme, je le faisais repeindre entièrement en blanc classique et il nous attendrait sagement dans une ferme des Yvelines pour nos déplacements métropolitains entre le Midi et l'Ouest, à chaque vacances d'été.
|
De haut en bas et de droite à gauche : Manhattanville Bus Depot, près de l'Hudson River et de la Columbia University, New York, un taxi jaune, Yellow Cab - 163 42° rue de nuit, New York et 31 Taxi à Time Square, New York, Van arc en ciel, Eight Avenue, New York, Faux Polaroid - Béatrice et Jacques skateurs à la manière de Munoz & Sampayo, Vrais Polaroids - Jacques et Béatrice au Mac Donald et dans le Métro, Graffitii sur des toilettes publiques, New York et à Staten Island, New York. |
|
De haut en bas et de droite à gauche : Le Transit Rue Boinot, Paris octobre 1982, Transit à Lezennes (Love), quartier de Lille en novembre 1982, Le Mariage de Bruno et Françoise et le Transit customisé au mariage de Bruno et Françoise, Dampierre-sur-Loire en Saumur en juin 1983. |
|
Carnaval de Fort-de-France en février 1984 ; les guimbardes et les hommes travestis en femmes. |
|
De haut en bas et de droite à gauche de novembre à décembre 1983 : Le Diamant et le Morne Larcher vu de la plage de Sainte Luce, Martinique, La côte Atlantique, de la Caravelle à Grand-Rivière, Martinique, Habitation Dubuc, La Caravelle, Martinique, L'immense fromager avec Béatrice près de Saint-Pierre, Martinique, Le Diamant et le Morne Larcher vu de la plage des Salines, Martinique, Cocotiers à l'Anse Ceron, Martinique, Maison de pécheur sur un îlet, Le Marin, Martinique, Le Diamant et le Morne Larcher vu de la plage des Salines, Martinique. |
|
Les deux photos de droite : Le Transit accidenté à Desbrosses-la-vallée, Fort-de-France, Martinique en juin 1984. |
|
Carte postale : Graffiti K-Bird, 1978, Handball Court, Bronx, NYC by Rafael Santiago. |
|
Juillet 1982 : Créations n°12 - revue des pédagogies Freinet, article "Custom de petits et grands"_ couverture. |
|
Juillet 1982 : Créations n°12 - revue des pédagogies Freinet, article "Custom de petits et grands"_ pages. |
|
Juillet/Août 1982 - Le Transit (premiers jours sur un chantier à Cannes). |
|
Juillet/Août 1982 - Le Transit (premiers jours sur un chantier à Cannes). |
|
Juillet/Août 1982 - Le Transit (premiers jours sur un chantier à Cannes).
|
|
Juillet/Août 1982 - Le Transit (premiers jours sur un chantier à Cannes).
|
|
Juillet/Août 1982 - Le Transit (premiers jours sur un chantier à Cannes).
|
|
Novembre 1983 Le Transit à la Caravelle, Martinique. |
|
Novembre 1983 Le Transit à Sainte-Marie, Martinique. |
|
Le capot du Transit accidenté, Desbrosses-la-vallée, Fort-de-France, avril 1984. |
|
Le Transit accidenté chez nous, Desbrosses-la-vallée, Fort-de-France, avril 1984. |
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire