"Mes transports pas amoureux mais presque" ou
"Ces mécaniques que j'ai roulées"
N°9 : La 306 SW Peugeot de 2001 (de 2002 à 2016).
Achetée dans l'urgence, avec peu de moyens, la 306
ressemblait beaucoup à un mariage de raison. C'était encore un diesel mais
atmosphérique cette fois, entendre sans Turbo. Habitué à une voiture nerveuse
et puissante, j'ai très vite regretté mon Turbo et j'avais un peu l'impression
d'avoir retrouvé les performances de ma 2 cv dès qu'une côte un peu longue
s'annonçait sur l'autoroute. Ça ne m'a pas empêché d'attraper un maximum de PV
pour excès de vitesse tout au long de ces années riches en radars automatiques,
gendarmes planqués avec leurs jumelles et autres voitures pièges que ce soit en
ville ou à la campagne.
Elle était gris bleu métallisé, consommait très peu de
carburant et avait, elle aussi, une climatisation. Elle était équipée de barres
de toit et les sièges arrière rabattants permettaient une grande plateforme de
chargement, en réalité, un volume bien moindre que nos véhicules précédents.
Les enfants grandissaient et souhaitaient de moins en moins passer des vacances
en famille, du coup, cela ne posait plus trop de problèmes.
Curieusement, ce fut un véhicule affecté davantage aux
transports d'objets que de passagers et le souvenir marquant de ces quatorze
années de vie commune reste lié à l'art et aux déménagements d'affaires en tous
genres. Comme les enfants se sont engagés dans des études supérieures, la 306 a
souvent servi pour divers petits déménagements de la maison à leurs chambres
d'étudiant et retour ou encore pour nos affaires moins usitées entre les deux
maisons parentales. Une fois, nous sommes revenus de Lorient avec un énorme
coffre chinois en bois de santal qui passait juste sous le toit, il était bien
calé par d'autres souvenirs familiaux divers au format inhabituel. Il y avait
par exemple, une sagaie maorie, avec son arc et ses flèches d'un mètre
quatre-vingt-dix, qui tenaient juste entre la courbure du toit et le coffre
chinois. A chaque coup de freins un peu brusque il fallait baisser la tête
promptement pour éviter la pointe de la lance qui était projetée vers l'avant
et venait finir sa course sur le parebrise.
A cette période, Chloé est entrée aux Beaux-arts, dans
une formation volume. Un des premiers exercices imposés était de faire une
sculpture en torchis. De la tuilerie de Saint Henri, j'ai chargé la 306 de près
d'une demi tonne de tuiles d'argile molle, j'avais l'impression que les pneus
touchaient la carrosserie. Du Centre équestre Pastré, j'ai ramené deux ou trois
bottes de paille. Un peu plus tard, elle travaillait sur des sculptures en
glace et c'est un petit congélateur qui est rentré dans la voiture. D'autres
fois c'était du mobilier de chez Emmaüs. Ensuite, il y a eu des structures de
verre, des bonhommes en lanières de carton et de rhodoïd, de grandes plaques de
plexiglass, de 2 m par 1,20 m, avec des impressions de bonhommes en flammes, amarrées
sur le toit. Puis est venu le temps des installations avec plaques de
polycarbonate et ballons en gélatine fluorescente et tout un inventaire où
Prévert n'y retrouverait plus ses petits.
Dans le cadre d'Erasmus, Chloé a suivi une formation d'un
an dans une école d'art britannique à Bristol. En fin d'année on traversait la
Manche avec la 306 pour la ramener et récupérer ses dernières productions.
C'est là, après quelques frayeurs dans des ronds-points, que j'ai compris que
la conduite à gauche n'était pas très naturelle ni pour nos voitures, ni pour
nos reflexes frenchies habituels. Cela ne nous a pas empêché d'aller voir le
lieu magique du Tor de Glastonbury où Sting a tourné le clip de "If I Ever
Lose My Faith In You" et de découvrir la soi-disant tombe du Roi Arthur et
de Guenièvre au milieu des ruines de l'Abbaye de Glastonbury où quelques mois
auparavant, Neil Young, Bruce Springsteen et Blur avaient enflammé le public du
non moins célèbre Festival du même nom.
Et puis, il y a eu aussi les premières expositions de
Chloé : Le Parcours de l'Art, à Avignon, où la 306 était chargée de dizaines de
bonhommes en matériaux divers, l'autre à Fontaine obscure, à Aix-en-Provence,
avec des mannequins bourrés de bandes de plastique orange, une autre sur
Marseille, aux Ateliers Boisson, Archipélique 3 avec ses installations aux
lumières noires.
L'autre implication dans l'Art et les Arts Plastiques de
la 306 était plus usuelle et moins manutentionnaire. Elle nous a permis de nous
rendre à cinq ou six Biennales de Venise et autant pour celles de Lyon, de
faire régulièrement des sauts dans les grands musées parisiens et ceux de toute
la région du Sud-Est, de Nîmes à Nice et avec une régularité de métronome pour Arles
et Avignon. Une autre séquelle, et non des moindres, fut que nous avons pu nous
rendre à la rencontre d'artistes vivants ou participer à des œuvres comme ce
fut le cas pour un pique-nique avec Joan Fontcuberta et Stéphane Bérard à Digne
en 2012. Ou encore les vernissages au MAMAC à Nice, pour y croiser les belges Wim
Delvoye en 2010, et Arne Quinze en 2013. Le souvenir le plus marquant reste la
descente du Rhône d'Arles à Salins-de-Giraud de la "Decise" de et avec
Tadashi Kawamata, le 14 juillet 2013. Quatre heures sur un pointu à
procrastiner en regardant le paysage, Decise et les autres embarcations de la
flottille sous un soleil radieux rythmé par les pout-pouts du diesel. A
l'arrivée l'œuvre voyageuse a été chargée sur une remorque puis installée à
Salins en tant qu'aire de jeux d'enfants. La 306 était restée sur les quais Saint
Pierre à Trinquetaille pendant tout ce temps et après une demi-heure de navette
routière, je la récupérais pour aller chercher le reste de la famille restée à
Salins.
En août 2012, de retour de la Grande Parade du Festival
Interceltique à Lorient, nous étions un peu perdus dans un lotissement du
quartier du Manio, et brusquement la 306 heurtait et projetait contre une
clôture une camionnette qui avait abusé de sa priorité et profité de mon manque
de vigilance. Je rageais parce que je roulais au pas et surtout parce que je venais
de faire repeindre à neuf la voiture un mois avant.
En août 2015, nous étions à Trieste et nous avions
projeté d'aller visiter les grottes de Postumia (Postujna), en Slovénie voisine,
avec nos nièces. Nos pique-niques dans nos sacs, nous descendons à la voiture
de bon matin, j'actionne le Neiman, le démarreur tourne mais le moteur refuse
de partir. J'insiste une bonne dizaine de fois avant de renoncer, je vais voir
un garagiste à deux pas sur le boulevard Gabriele d'Annunzio, il vient, essaye
à son tour et constate l'anomalie. Il pense que cela vient de l'antivol
électronique et me conseille d'aller voir chez un concessionnaire Peugeot à
quelques kilomètres et m'y amène avec sa dépanneuse. Nathalie, ma belle-sœur,
m'accompagne pour traduire en italien et en français. Les tentatives pour
réinitialiser l'ordinateur de bord sont infructueuses et le chef d'atelier me
propose un bricolage pour le court-circuiter : il installe un fil et un
condensateur entre deux éléments électriques dont la batterie. Le hic, c'est
que lorsque j'arrêterais dorénavant la 306, il faudra retirer ce fil de la
batterie sous peine de la voir se vider entièrement et donc de ne plus pouvoir
redémarrer. J'accepte cet aménagement en me disant que cela ira bien pour
rentrer et que je ferais réparer sérieusement à Marseille.
Une fois à Marseille, je déchantais rapidement : le
changement d'ordinateur de bord coûtait une somme énorme pour une vieille
mécanique bien fatiguée qui commençait à me ruiner en réparations
diverses. Nous avons donc roulé avec le
bricolage d'Italie pendant les cinq ou six mois qui suivirent, avec
manipulation dans le capot bien sûr, et puis, j'ai cherché une remplaçante. Plutôt
satisfaits de la 306, nous souhaitions une 308 SW (break) avec toit transparent
mais il n'y en avait pas de disponible d'occasion à ce moment-là, le commercial
nous a montré une 508 SW blanche avec le toit comme on voulait. C'était un
diesel mais très puissant avec boite automatique, une merveille sur quatre
roues d'après le vendeur. La 306 a été reprise en l'état pour une somme honnête
et je l'ai donc lâchement abandonnée sur le parking de chez Peugeot avec un
panneau explicatif pour le branchement particulier sous le capot.
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Joan Fontcuberta et Stéphane Bérard, Arne Quinze, Wim Delvoye |
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Decise et Tadashi Kawamata |
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A Peugeot Trieste |
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A Peugeot Marseille |
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2004-07-29 Carcassonne et autres, de retour de Lorient (photo de Chloé) |
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2006-04-16 Pâques à Mougins, Jean-Paul sur la mini-moto |
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2008-03-13 L'Atelier 36 aux Beaux-Arts, Sculptures de Chloé |
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2008-10-04 Exposition de Chloé au Parcours de l'Art, Espace Vaucluse, Avignon |
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2009-05-01 Arles, le pont Van Gogh (ex Pont de Langlois) |
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2009-07-22 Devant la maison à Mougins |
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2009-11-08 Brûlage des bonhommes de Chloé à Aix (photo d'Hervé où Françoise) |
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2010-08-07 Chez Bruno, la maison du Pacha |
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2012-08-06 Lorient la 306 abimée
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2012-08-06 Lorient la 306 abimée
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