samedi 31 juillet 2021

Aventure Facebook du 30-07-2021

"Mes transports pas amoureux mais presque" ou "Ces mécaniques que j'ai roulées"

N°5 : Le Ford Transit de 1982 à1984 (deuxième période).

En août 1982, le Transit rentrait à "L'Atelier" pour quelques jours de relooking. Comme vous l'avez vu précédemment, la somme gagnée à "Jeune Afrique" en 1981, nous avait permis de verser les premières mensualités pour le Transit mais surtout avait rendu possible un voyage à New York, avec notre ami Daniel, où nous avons fait un séjour d'un mois et demi. Nous étions revenus gavés d'images d'Epinal des States : des rollers skates dans Central Park aux Yellow Cabs à Time Square, nous découvrions les premiers graphs mobiles sur les rames de Métro : éclairs hallucinés et colorés dont on ne s'est jamais trop remis. J'avais photographié pas mal de graphs fixes à Staten Island qui me plaisaient bien et c'est naturellement au vocabulaire graphique des graffitis new-yorkais que j'ai pensé pour habiller ma mini rame perso. Dans la Grosse Pomme, on avait vu des vans aussi et c'était un peu dans cet esprit qu'on avait aménagé le Transit. A l'époque, je feuilletais des revues genre "Chromes et flammes" et "Nitro" : les pneus californiens "Pos-a-traction" et les peintures "Candy Apple" étaient pour nous des incontournables d'une customisation réussie. Comme Claude Venturelli était un pro de la peinture sur carrosserie, il s'est chargé de m'acheter les couleurs qui correspondaient à mes photographies modèles et les paillettes diffractantes à noyer dans les multiples couches de vernis polyuréthane. Il m'a aussi repeint entièrement en blanc immaculé les tôles un peu défraichies par le périple algérien. Je me suis donc attelé à la tache de reproduire les graphs new-yorkais choisis sur les différents panneaux du Transit avec l'aérographe professionnel de Claude et quelques jours plus tard c'était terminé. Jean-Paul, avec son savoir-faire, m'a même reproduit des typos publicitaires qui surnageaient entre les graphs pour un trompe-l'œil encore plus fidèle. Claude a verni l'ensemble des huit couches incrustées des paillettes. Pour sa première sortie à Cannes, le Transit a été repéré par un journaliste de "Créations", organe des pédagogies Freinet, qui travaillait sur un article où il était question de "customs de petits et de grands".

Ensuite, nous sommes remontés sur Paris où se trouvait mon nouveau poste. Le Transit dormait au pied de chez nous, dans la rue Boinot, entre Montmartre et Clignancourt, où nous habitions, et n'a jamais été vandalisé. Une seule fois, alors que nous étions en virée à Lille, chez Véro, une main amoureuse avait tracé au pinceau dégoulinant un "Love" rouge et baveux, pendant la nuit.

En septembre 1983, je quittais mon poste de Goussainville pour une mutation à Fort-de-France, en Martinique. J'avais droit à un container pour mes effets personnels, j'y ai mis surtout ma camionnette et quelques cantines d'affaires.

La Martinique est une petite île des Caraïbes, les routes sont étroites et les véhicules particuliers modestes ou discrets, leurs conducteurs pas toujours scrupuleux sur le respect de leur droite. Bref, un peu l'inverse de la spécificité de notre Transit qui était large et voyant. Bariolé comme il était, il rappelait aux gens les guimbardes de Vaval, souffre-douleurs pétaradants des Carnavals. Pas un début de semaine ne se passait sans qu'un élève me dise qu'il avait vu le Transit le dimanche à la Caravelle, au Prêcheur ou aux Salines. Mieux qu'une balise Argos ou un bracelet pénitencier, mon étendard à roulettes ne pouvait pas cacher ma présence ici ou là et le "maquerellage/makrêlage" allait bon train. En rajoutant le fait qu'on boit encore davantage lorsqu'il y a des fêtes : "Vaval" bien sûr mais aussi le lundi de Pentecôte, jour du "Matoutou" ou encore "La Fête des mères".

Le premier accrochage a eu lieu le soir du Mardi Gras, le conducteur du véhicule adverse était travesti en femme (un classique) et s'est raccroché à sa portière pour ne pas s'affaler sur la route pour remplir son constat amiable. Quelques mois après, le jour de la Fête des Mères, un autre chauffard, lui aussi chargé en rhum, ratait son virage et me frappait au niveau de l'aile et de la portière avant. Il n'y avait pas de concessionnaire Ford en Martinique et je ne pouvais pas faire réparer mes dégâts qui nécessitaient de changer entièrement porte et aile. Nous avons alors compris avec certitude que notre cher Transit n'avait pas sa place sous ces tropiques-là et qu'il allait falloir lui trouver un remplaçant d'urgence. Les 205 Peugeot se vendaient comme des petits pains aux dires de la commerciale. Il y en avait effectivement beaucoup en circulation, elles étaient petites, compactes et maniables, idéales pour les routes martiniquaises et leurs usagers parfois approximatifs. On en a commandé une et on a renvoyé le Transit amoché en métropole.

Venu en quinze jour par bateau, le Transit a été chargé sur un Boeing 747 d'Air France Cargo et a été déchargé neuf à dix heures plus tard à Orly où je le récupérais pour le faire réparer. La partie réparée était blanche, cela m'aurait coûté trop cher de racheter les multiples couleurs, les paillettes et de faire refaire les multiples couches de vernis. La mort dans l'âme, je le faisais repeindre entièrement en blanc classique et il nous attendrait sagement dans une ferme des Yvelines pour nos déplacements métropolitains entre le Midi et l'Ouest, à chaque vacances d'été.


De haut en bas et de droite à gauche : Manhattanville Bus Depot, près de l'Hudson River et de la Columbia University, New York, un taxi jaune, Yellow Cab - 163 42° rue de nuit, New York et 31 Taxi à Time Square, New York, Van arc en ciel, Eight Avenue, New York, Faux Polaroid - Béatrice et Jacques skateurs à la manière de Munoz & Sampayo, Vrais Polaroids - Jacques et Béatrice au Mac Donald et dans le Métro, Graffitii sur des toilettes publiques, New York et à Staten Island, New York. 



De haut en bas et de droite à gauche : Le Transit Rue Boinot, Paris octobre 1982, Transit à Lezennes (Love), quartier de Lille en novembre 1982, Le Mariage de Bruno et Françoise et le Transit customisé au mariage de Bruno et Françoise, Dampierre-sur-Loire en Saumur en juin 1983.


Carnaval de Fort-de-France en février 1984 ; les guimbardes et les hommes travestis en femmes.

De haut en bas et de droite à gauche de novembre à décembre 1983 : Le Diamant et le Morne Larcher vu de la plage de Sainte Luce, Martinique, La côte Atlantique, de la Caravelle à Grand-Rivière, Martinique, Habitation Dubuc, La Caravelle, Martinique, L'immense fromager avec Béatrice près de Saint-Pierre, Martinique, Le Diamant et le Morne Larcher vu de la plage des Salines, Martinique, Cocotiers à l'Anse Ceron, Martinique, Maison de pécheur sur un îlet, Le Marin, Martinique, Le Diamant et le Morne Larcher vu de la plage des Salines, Martinique.

Les deux photos de droite : Le Transit accidenté à Desbrosses-la-vallée, Fort-de-France, Martinique en juin 1984.


Carte postale : Graffiti K-Bird, 1978, Handball Court, Bronx, NYC by Rafael Santiago.

Juillet 1982 : Créations n°12 - revue des pédagogies Freinet, article "Custom de petits et grands"_ couverture.

Juillet 1982 : Créations n°12 - revue des pédagogies Freinet, article "Custom de petits et grands"_ pages.

Juillet/Août 1982 - Le Transit (premiers jours sur un chantier à Cannes).

Juillet/Août 1982 - Le Transit (premiers jours sur un chantier à Cannes).

Juillet/Août 1982 - Le Transit (premiers jours sur un chantier à Cannes).


Juillet/Août 1982 - Le Transit (premiers jours sur un chantier à Cannes).


Juillet/Août 1982 - Le Transit (premiers jours sur un chantier à Cannes).


Novembre 1983 Le Transit à la Caravelle, Martinique.

Novembre 1983 Le Transit à Sainte-Marie, Martinique.

Le capot du Transit accidenté, Desbrosses-la-vallée, Fort-de-France, avril 1984.

Le Transit accidenté chez nous, Desbrosses-la-vallée, Fort-de-France, avril 1984.

mercredi 28 juillet 2021

Aventure Facebook du 21-07-2021

"Mes transports pas amoureux mais presque" ou "Ces mécaniques que j'ai roulées"

N°4 : Le Ford Transit MK2 de 1979 (première période).

Cette année-là, en travaillant comme illustrateur pour les éditions "Jeune Afrique", j'avais gagné un petit pactole qui améliorait sensiblement ma petite paye de prof débutant. Et, déraciné du Midi oblige, j'allais certainement devoir déménager beaucoup avant de pouvoir revenir dans mon Sud préféré. Je m'étais mis en tête d'être mon propre déménageur, il me fallait donc mon propre camion. Le nouveau look de la camionnette "Transit" de chez Ford m'avait fait de l'œil et peut-être aussi que c'était moins cher que chez la concurrence.

Il était blanc et un peu noir aussi, il consommait seize litres aux cent mais ça ne m'horrifiait pas encore. Bien que flambant neuf, il avait un atavisme congénital : le moteur se coupait tout seul de manière imprévisible. Cela pouvait arriver n'importe quand, n'importe où et quand cela se produisait, il n'y avait qu'un moyen de repartir, c'était d'enclencher la marche arrière et de donner un coup de démarreur. Ce n'était jamais plaisant mais, lorsque cela nous est arrivé dans le tunnel de Saint Cloud sur l'autoroute, ce fut carrément "craignos". J'ai mis en demeure le concessionnaire de trouver l'origine de la panne. Une fois la pièce électrique défectueuse repérée et changée nous sommes partis pour 17 ans de vie commune sans grosses pannes mais pas sans histoires.

De Lyon à Paris puis à Maubeuge, mon Transit parcourait les nationales à belle allure avec son passager muet mais encombrant (voir ici aussi, "les Aventures de ma mort de 1978"). A Maubeuge, à cause du froid et de l'humidité, l'hiver, il fallait respecter un protocole le matin avant de pouvoir aller travailler : démarrer le moteur et attendre bien cinq minutes avant de pouvoir passer les vitesses, l'huile étant figée par le gel. En 1981, n'en pouvant plus de ce climat chti, je postulais pour une coopération en Algérie que j'obtenais et, en septembre, je traversais la Méditerranée avec mon Transit aménagé intérieurement façon van/camping-car. Avec mon frère Michel, pendant les vacances, on avait installé un grand lit, un réchaud, un lavabo, des coffres avec des réservoirs d'eau, des coffres immenses pour toutes sortes de choses. Tout avait été isolé, capitonné, un toit ouvrant avait été placé, des rideaux pouvaient obstruer tous les vitrages et cerise sur le gâteau, il y avait un couvre-lit en faux-zèbre.

Le pays étant magnifique et immense, l'essence et les produits pétroliers à un prix ridicule, on a sillonné émerveillés l'Algérie et la Tunisie, en long, en large et en travers : plus de quarante mille kilomètres en dix mois. Pour le désert et les longues destinations sans beaucoup de stations-services, au mépris de la sécurité, on avait plusieurs jerricans de vingt-cinq litres d'essence sur les marchepieds et une centaine de litres d'eau pour nous, les passagers, afin d'éviter la déshydratation, dans un coffre à l'arrière. Après quelques frayeurs d'ensablement sur des pistes sablonneuses, on rentrait sur Mougins pendant les vacances de Pâques et on installait des jantes larges et des pneus de Formule 1 sur le Transit avant de regagner notre lieu de résidence à Sour-El-Ghozlane. Nous n'avons plus jamais eu de soucis avec le sable sec mais hélas, il pleut quelquefois dans le désert même si cela n'arrive qu'au mieux tous les cinq ans.

Dans notre guide Hachette du Sahara, nous avions repéré un coin sympa, le lac sacré de Merdjerda près de Touggourt. Il y était précisé qu'il fallait prendre un enfant comme guide à Temacine. Nous avons trouvé notre jeune guide et nous sommes parti vers le lac mais il avait plu la veille. Le sable boueux avait pris la consistance du Nutella et notre guide était désemparé devant cette nouveauté. Le Transit n'a pas tardé à s'enliser jusqu'au moyeu et tous mes efforts de marche avant, marche arrière pour sortir de l'ornière sont restés vains. La nuit est tombée et après plus d'une heure de tentatives sans succès, on s'apprêtait à dormir sur place lorsqu'un homme est arrivé de nulle part avec une plaque de désensablage. Il l'a mis sous nos roues et en quelques minutes on regagnait un sol plus ferme. Nous avons ramené l'enfant à sa famille et nous avons dormi sur un parking près de Touggourt, nous n'avons jamais vu le lac sacré. Par contre, le Transit gardera pendant des années du sable salé corrosif sur les longerons du châssis, les Karchers et l'eau courante étant plutôt rares dans cette région.

Une autre fois, nous roulions à tombeau ouvert sur une ligne droite transsaharienne en direction du Nord lorsque nous avons croisé une Toyota 4 x 4 suivie d'une Land Rover. Si nous ne connaissions pas la Land Rover, nous avons tout de suite eu une impression de déjà-vu concernant la Toyota Land Cruiser et immédiatement nous avons pensé à celle du patron de Jean-Paul, mon frère, qui travaillait comme peintre en lettres à "L'Atelier" au Cannet. C'était la même couleur gris-vert, les mêmes coffres de pickup et un barbu au volant. Ni une, ni deux, coup de frein monstrueux (après coup d'œil dans le rétroviseur) et demi-tour au milieu de nulle part. Deux minutes après, nous roulions à près de 140 km/h, à la poursuite des deux 4 x 4. Au bout d'une dizaine de kilomètres, tout près d'El Oued, on finissait par les rattraper et les obliger à se ranger sur le bord de la route. C'était bien eux, accompagnés d'un ami en Land Rover. Eux, c'étaient les Venturelli, Claude et Marie-Thérèse : des pros, un couple dingue de tous les déserts, qui souvent traçaient leur piste à la boussole et trouvaient des objets préhistoriques du Tassili au Niger, de la Toundra au Lac Baïkal. Nous n'avons pas dérogé aux lois de l'hospitalité touareg et cinq minutes plus tard, on buvait sur place un thé à la menthe en prenant rendez-vous pour des retrouvailles futures, chez nous, à Sour-El-Ghozlane. Le monde est bien petit !

Fin juillet 1982, après un dernier baroud d'honneur de déserts sahariens, sous des températures folles et des milliers de mouches qui ne l'étaient pas moins, on rentrait définitivement en France et je m'attaquais à la customisation extérieure de mon van, chez les Venturelli, au chemin de l'Olivet, qui mettaient à ma disposition leur atelier, tout leur matériel et leur savoir-faire en matière de peinture automobile.



La Résidence Mykonos à Maubeuge vue de ma fenêtre à divers moments de l'année (vrais Polaroids) et Béatrice et moi à la manière de Joost Swarte (faux Polaroid).



En haut, nuages sur le désert près de Biskra. En bas, une oasis cultivée à El Oued.


Le dessous du Transit et une vue des années 50 du lac sacré de Merdjerda près de Temacine.



De haut en bas, en noir et blanc : Le désert aux alentours de Ghardaïa, Entre In Salah et Timimoun, Aux environs de Constantine, Dunes aux alentours de Ghardaïa.
De haut en bas, en couleurs : Grand Sud tunisien près de Nefta, Chott El Djeridj en Tunisie, Coucher de soleil sur la palmeraie à El Goléa, Dunes vers El Goléa, en Algérie.

Le Transit dans la neige entre El Kantara et Biskra, Algérie.

Le Transit dans le désert après Aïn Salah, Algérie.

Le Transit en Algérie, entre Ain Salah et Timimoun avec les jerricans d'essence sur le marchepied.

Le Transit sur un parking à Toggourt, à côté d'un camion transporteur de pipe-line d'Hassi Messaoud. Après l'épisode Nutella.
Le Transit sur un parking à Toggourt, à côté d'un camion transporteur de pipe-line d'Hassi Messaoud. Après l'épisode Nutella.

Marie-Thérèse et Claude Venturelli, leur ami et moi en T-shirt blanc à notre point de rencontre entre El Oued et Biskra.

Le Transit lors d'un méchoui près de Bouira avec des amis algériens et des coopérants ou amis : Jean-Michel, Louis, Bernard, Dorino et Dorinette, de dos en rouge c'est moi en attiseur de feu.

Le Transit lors d'un méchoui près de Bouira avec des amis algériens et des coopérants ou amis : Bernard, Louis et moi en noir.

Le Transit lors d'un méchoui près de Bouira avec des amis algériens et des coopérants ou amis : Jean-Michel, Louis, Bernard, Dorino et Dorinette, c'est Béatrice avec la veste beige au milieu du groupe.






mercredi 7 juillet 2021

Aventure Facebook du 7-07-2021

 "Mes transports pas amoureux mais presque" ou "Ces mécaniques que j'ai roulées"

N°3 : La 2 CV Citroën de 1964.

Ma première voiture ne pouvait-être qu'une 2 CV. Ce fût la première voiture de mon père. Ça avait été celle de Gaby, mon meilleur copain de Fac, mais aussi celle de Machu, d'Edmond et de Gaétan (qui en ont eu même plusieurs). Après avoir passé mon permis de conduire par stage d'une semaine, en août 1978, à Nice, je me suis mis en quête de me trouver ma "deuche" à moi. Je l'ai trouvée à Vallauris. Elle était bleue avec des bandes jaunes, n'avait pas de banquette arrière et un rotor de dynamo trop usé pour pouvoir assurer la recharge de la batterie, bref c'était une vieille dame de 14 ans, pas mal fatiguée mais qui avait de beaux restes. Le 13 septembre, marché conclu pour 700 francs, mon "90 aimanté" aux fesses, je ramenais ma splendeur, à Mougins, pour la faire voir à mon père et à mon frère Michel qui s'y connaissaient en voitures d'occasion. Leur expertise a établi que je n'avais pas fait une trop mauvaise affaire mais qu'il était hors de question que je rejoigne mon poste à Lyon et Vénissieux sans avoir fait quelques réparations urgentes : la dynamo et d'autres broutilles dont je n'ai pas gardé le souvenir. J'ai donc été prendre mon poste et mon appartement à Vénissieux avec le train et je suis revenu récupérer mon escargot le weekend suivant. Michel m'avait tout réparé lui-même sauf la dynamo qu'il avait fait réaléser par un électricien auto pour une somme négligeable.

Lorsque j'ai pris la route vers Lyon, je me suis rendu compte que si le moteur tournait comme une horloge, les roues n'avançaient pas aussi vite que je le souhaitais et il y aurait eu peu de risques que je dépasse mon autorisation des 90 kms/h imposés aux conducteurs débutants. Mais ce fut lorsque j'essayais d'aller à Paris avec mon bolide que je me suis rendu compte que les voyages étaient horriblement longs. La moindre côte, le moindre faux plat et l'aiguille du compteur descendait, descendait. Pourtant, même si j'ai vite renoncé à l'utiliser pour des trajets longs, de sauts de puces pour des courses sur Lyon en petites balades dans les bourgades villes avoisinantes, j'en ai fait des kilomètres cette année-là avec ma 2 CV. Certaines péripéties et anecdotes sont racontées dans ma série du "Surréalisme facile en 10 leçons" ici même à "La tentative Blogger 91" dans des "Spécial 2 CV".

Et puis, pour les vacances de Pâques 1979, Béatrice et Daniel sont descendu de Paris pour me retrouver. J'avais acheté une banquette arrière et différentes pièces chez un ferrailleur de Vienne pour améliorer ma bagnole et le confort de mes passagers. J'envisageais de la repeindre plus tard avec des options très personnelles, un tantinet provocatrices. Nous sommes partis pour un périple qui s'est avéré riche en décors, en découvertes et surtout dévoreur de kilomètres. Le but au départ, c'était le Palais Idéal du Facteur Cheval à Hauterives dans la Drôme et le Vercors mais après on a filé sur Montélimar, puis les gorges de l'Ardèche, puis la Lozère et on a fait un crochet pour aller voir Gaétan à Génolhac qui n'était pas là, alors on a poursuivi jusqu'à Montpellier pour aller chez les parents de Daniel. Daniel y est resté. Avec Béatrice, nous avons repris la route pour tenter une deuxième fois de retrouver Gaétan à Génolhac, on s'est arrêté au château de Portes à demi écroulé et en pleine restauration puis, Gaétan n'étant toujours pas arrivé à Génolhac on redescendait vers Nîmes dans l'espoir de terminer notre odyssée à Mougins. Le voyage de plus de 1500 kms en une semaine avait pas mal usé ma vigilance. Dans un champ, près d'Uzès un cheval paissait, non plutôt un poney, non plutôt un cheval ou un poney ou alors un mulet et Boum, un grand bruit de verre brisé et de tôles tordues, j'avais explosé ma deuche contre le parapet d'un pont romain, en pleine ligne droite. Béatrice avait fracassé le pare-brise et moi j'avais plié la tablette sous le volant avec mes genoux. Comme nous n'étions qu'à quelques kilomètres d'Uzès, on a fait du stop pour trouver un ferrailleur qui veuille bien dégager l'épave. Par chance, celui qu'on a contacté cherchait un moteur de 2 CV et le soir même, nous prenions le train pour finir notre voyage avec 500 francs en poche donné par le ferrailleur pour notre épave. J'avais roulé presque toute mon année scolaire pour 200 F + le carburant. Ne cherchez pas, je n'ai jamais trouvé depuis un véhicule qui m'ait coûté aussi peu cher du kilomètre.







mercredi 30 juin 2021

Aventure Facebook du 30-06-2021

"Mes transports pas amoureux mais presque" ou "Ces mécaniques que j'ai roulées"

N°2 : La BB TS3 Sport 1970 de Peugeot.

Deuxième et dernière "Mob", donc ! Entre temps, comme les motards de la gendarmerie qui allaient toujours par deux, j'avais rencontré mon binôme en classe de Seconde au Lycée Raymond Naves. C'était Vincent. Lui, il avait acheté une Motobécane Spéciale "Orange" neuve et nous faisions tous les jours ou presque, la route jusqu'au lycée Berthelot et d'autres balades quand l'envie nous en prenait et que nos familles nous y autorisaient. C'était fort agréable d'avoir des machines où les bougies ne perlaient que très rarement et puis à deux, l'un ou l'autre avait toujours son outillage dans la selle ou sur le cadre. 

Je me souviens que l'hiver avait été particulièrement rude à Toulouse, en 1970, et malgré nos machines fiables et nos énormes gants de cuir fourré, les seize kilomètres avec des températures bien au-dessous de zéro, tétanisaient nos doigts très souvent jusqu'à qu'à la deuxième heure de la matinée. Ce n'était pas beaucoup plus agréable les jours de pluie où il fallait composer avec le temps de séchage. 

Et pourtant, nous étions les rois du monde dès que nous étions sur nos montures, et gare aux petits vieux (nos ennemis revendiqués) qui auraient traversé alors que les feux passaient au vert pour nous rue Alsace-Lorraine. On démarrait en faisant rugir nos ridicules petits moteurs et on faisait cabrer sur la roue arrière. C'était difficile et bien plus sportif pour Vincent qui ne tenait son décollage que sur cinquante à soixante centimètres en tirant comme un malade sur le guidon de sa machine trop lourde de l'avant. Pour moi, avec mes vitesses manuelles, c'était limité à une torsion rapide du poignet, je ne faisais pratiquement aucun effort et ne retombais sur mes deux roues que deux ou trois mètres plus loin. Nous étions dans la même classe au lycée et demi-pensionnaires pour s'éviter trop de trajets journaliers. 

On ne quittait pas, tous les deux, on avait un peu les mêmes goûts, les pantalons pattes d'éléphant et les lunettes miroir bien avant de connaître "Easy rider". Pour rester sur une note cinéphilique, nos premiers films ensemble au cinéma furent "Le Messager" de Joseph Losey pourtant primé à Cannes et qu'on avait détesté alors qu'on avait adoré "Mash" de Robert Altman, "La fiancée du pirate" de Nelly Kaplan ou, encore plus sulfureux, le "J'irais cracher sur vos tombes" de Michel Gast, d'après Boris Vian, qui coïncidera curieusement avec la mort de notre auteur-phare, terrassé par la projection de l'adaptation calamiteuse de son œuvre. 

Avec nos engins, pour saluer nos réussites au BAC, nous avons fait un jour une excursion jusqu'à Castres ou nous avons campé dans les chaos granitiques et mangé tant de raviolis froids en conserve que pendant des années la simple vue d'une boite me donnait la nausée. Et puis à la rentrée de septembre 1971, nos machines et nos routes se sont séparées, Vincent est rentré à la Fac au Mirail, à Toulouse, moi je quittais définitivement la Haute-Garonne pour la Fac de Luminy, à Marseille. Nous nous sommes longuement écrits pendant les années qui ont suivi. Je ne sais pas si lui continuait de se servir de sa mob mais la mienne était remisée chez mes parents sur la Côte d'azur. En 1973, je travaillais pendant les vacances chez Onet sur Marseille, je suis allé sortir ma BB de son Bois-dormant pour mes déplacements de laveur de vitres et j'ai eu un accident, un matin, place Sébastopol. Ce qui m'a définitivement convaincu de ne plus utiliser un deux roues pour mes transports usuels. La BB TS3 a été réparée et a regagné son port d'attache dans ma famille. L'histoire de mes amours mécaniques ne se poursuivra dorénavant qu'à quatre roues au moins.









Aventure Facebook du 25-06-2021

 "Mes transports pas amoureux mais presque" ou "Ces mécaniques que j'ai roulées"

N°1 : La BB2 Sport 1958 de Peugeot.

Mon premier cyclomoteur, ma première "mob" avait un nom de star. Eh oui, "Et Dieu créa la femme" de Roger Vadim était sorti en 1956 et ensuite, dans les années 60, tout ce qui voulait s'attirer du public, "faire dans le coup", portait, comme le disait si bien Gainsbourg, les initiales BB. Et donc, même les 49 cc, à pédales obligatoires, au look improbable de mini motos pour "blousons noirs" en herbe.

La mienne était rouge et grise et arrivait d'Algérie où habitait mon grand-père à l'époque, elle datait de quelques années déjà et avait été utilisée par ses belles-filles Miette et Muguette. Je l'ai eu en 1967-1968 mais je pense qu'elle devait avoir été achetée en 1959 ou 1960. Mon grand-père me l'avait offerte parce mon collège était loin de la maison et que je me levais de très bonne heure le matin pour prendre le car, descendre à Bonnefoy et ensuite poursuivre à pied jusqu'à Jolimont.

Cette merveille avait dû chuter quelques fois et n'était pas impeccable mais elle avait des vitesses à main et ça, c'était un atout imparable qui faisait des envieux parmi mes camarades du CEG Marengo. Succès assuré et petit tour du jardin de la Colonne pour mes meilleurs potes sans oublier aussi une certaine angoisse lorsqu'ils ne revenaient pas au bout de trois minutes. Autre malaise pour mon BB, les jours des artificiers amateurs : lorsque mon copain Cauquil lançait, au pied de l'obélisque, ses fusées confectionnées avec des bouts de films nitrate-cellulose dans un tube en papier-journal. Fusées qui partaient hasardeusement à cinquante mètres ou plus en crachant des flammes de cinq mètres de long. Ou d'autres fois encore, les jours des mini bombes artisanales au chlorate de soude et au sucre, si fréquentes que s'en était devenu une sorte d'apéro avant de rentrer en classe.

Mais les trajets, de Toulouse à L'Union et retour, étaient bien longs pour cette petite machine vieillissante et, il m'arrivait quelquefois d'avoir la bougie qui perlait et pas d'outils pour réparer. Essayer de pédaler avec un réservoir entre les cuisses pour propulser un engin de plus de quarante-cinq kilos est une galéjade de fonctionnaire de Préfecture assez déconnecté des réalités du cyclisme, alors je poussais sur des kilomètres mon jouet momentanément cassé jusqu'à la maison. Quand j'étais au collège, cela ne m'était pas arrivé trop souvent mais au bout de quelques années, surtout à partir de la classe de Première que je suivais au Lycée Marcelin Berthelot, de l'autre côté de Toulouse, à plus de seize kilomètres de la maison, c'était beaucoup plus fréquent et de moins en moins supportable. Mes parents ont alors envisagé de lui trouver une machine de remplacement, neuve cette fois. C'était fin 1969 ou début 1970, mon choix s'est porté, comme par hasard, sur une Peugeot BB TS3 Sport avec un guidon moto cross et deux rétroviseurs mais surtout 3 vitesses à main, très proche de ma BB2 mais au look et au palpitant considérablement rajeunis.






A l'extrême droite, Miette et Muguette, les deux premières utilisatrices de ma future BB2 SP Peugeot. Photo prise par mon Grand-père, en juillet ou août 1958 à notre maison de L'Union dans la banlieue toulousaine. Les autres personnages en partant de la gauche : mon père avec mon frère Michel sur le genou, ma sœur Anne-Marie, Lucette la femme de mon grand-père et mère de Miette et Muguette, moi en débardeur, ma sœur Geneviève et Maman à l'arrière.




mardi 22 juin 2021

La tentative Blogger 106

Couleur ou noir et blanc 4

Revoilà l'ami Crumb qu'on n'avait pas vu depuis des mois. En vérité, c'est un peu triché parce que là Crumb est en noir et blanc mais il arrive tout droit de la couleur qu'il transpose. Je lis en ce moment le volume 5 de ses Sketchbooks paru chez Taschen et j'y ai trouvé plusieurs dessins faits à partir de tableaux célèbres de l'histoire de l'art, un peu comme "Le cauchemar" de John Henry Fuseli dont je vous ai parlé le 1 août 2019, voir ici même "L'aventure Facebook 21". Donc, quatre chefs d'œuvres de "Old Masters (en V.O.)" célèbres qui sont Jean Fouquet, Pieter Bruegel l'ancien, Gautier-d'Agoty et Léonard de Vinci, traités avec des petites hachures croisillonnées et interprétées par Crumb auxquels j'ai accolé les originaux de l'Histoire de l'Art. J'ai trouvé aussi dans le catalogue "Qui a peur de Robert Crumb ?" sorti à l'occasion de l'exposition que lui a consacré le festival d'Angoulême, en 1999, une production graphique voisine à partir de Pieter Bruegel mais d'après des gravures en noir et blanc. Il est amusant de constater que Crumb est parti, non pas de peintures mais de dessins sépia de Bruegel et qui plus est, d'estampes de Pieter Van Der Weyden où la gauche et la droite sont inversées. J'en profite aussi pour faire une mise à jour de Crumb et Bécassine (voir La tentative Blogger 17) ayant trouvé dans ce même recueil de croquis deux dessins supplémentaires de Bécassine topless. Et pour un petit bonus supplémentaire, je vous mets une histoire de Wallace Wood, "Blobs !" tirée du numéro 1 de la revue Mad (1952) que Crumb a également repris à sa manière en août 1991. Présentée dans deux versions : en français et en noir et blanc version album "Les années folles de Mad" (éditions du Fromage ©1978) et en version originale en couleurs (Mad ©1952). Vous voyez bien que tricher ça peut-être encore jouer ! 

R. Crumb Sketchbook vol. 5 © 2012 Taschen - page 67 - Charles VII roy de France d'après Jean Fouquet + tableau original de 1445, Musée du Louvre, Paris

R. Crumb Sketchbook vol. 5 © 2012 Taschen - page 103 - Medieval Leg Shot d'après Pietr Bruegel l'ancien + tableau original : La Fenaison, 1545, Palais Lobkowitz, Prague
R. Crumb Sketchbook vol. 5 © 2012 Taschen - page 108 - Le boudoir de Marie-Antoinette d'après Gautier d'Agoty + tableau original : Marie-Antoinette et ses dames, 1776, Château de Versailles

R. Crumb Sketchbook vol. 5 © 2012 Taschen - page 193 - Tête de Femme d'après Léonard de Vinci + dessin original : Etudes de la tête de Léda - 1505-1506, Royal Library, Château de Windsor
Qui a peur de Robert Crumb ? ©1999 Centre National de la Bande Dessinée et de l'image, Angoulême - page 25 + estampes de Pieter Van Der Weyden d'après un dessin original de Pieter Bruegel L'ancien : La Luxure de la série des 7 péchés capitaux, 1558 et L'âne à l'école, 1556 en bas

Qui a peur de Robert Crumb ? ©1999 Centre National de la Bande Dessinée et de l'image, Angoulême - page 25 + dessin original de Pieter Bruegel L'ancien : La Luxure de la série des 7 péchés capitaux, 1558

R. Crumb Sketchbook vol. 5 © 2012 Taschen - pages 197-198 - Les deux derniers dessins ne figuraient pas dans mon post : La tentative Blogger 17.

Robert Crumb Sketchbook n°5 - page 167 - Blobs d'après Wallace Wood + original de Wallace Wood dans Mad N° 1 de 1952

Blobs - planche 1 - Les années folles de Mad - L'écho des Savanes/éditions du fromage ©1978 + original Mad N°1 ©1952

Blobs - planche 2 - Les années folles de Mad - L'écho des Savanes/éditions du fromage ©1978 + original Mad N°1 ©1952

Blobs - planche 3 - Les années folles de Mad - L'écho des Savanes/éditions du fromage ©1978 + original Mad N°1 ©1952

Blobs - planche 4 - Les années folles de Mad - L'écho des Savanes/éditions du fromage ©1978 + original Mad N°1 ©1952

Blobs - planche 5 - Les années folles de Mad - L'écho des Savanes/éditions du fromage ©1978 + original Mad N°1 ©1952

Blobs - planche 6 - Les années folles de Mad - L'écho des Savanes/éditions du fromage ©1978 + original Mad N°1 ©1952

Blobs - planche 7 - Les années folles de Mad - L'écho des Savanes/éditions du fromage ©1978 + original Mad N°1 ©1952